14 avril 2021

Rol y Rol de Chus Gutiérrez

Élu meilleur documentaire 2021 lors du Festival de cinéma espagnol de Nantes.

1ère critique écrite par Margot

Malgré les salles de cinéma fermées, le Festival de cinéma espagnol, pour ses 30 ans, rend notre confinement plus joyeux. La programmation est disponible sur une plateforme de streaming et grâce au dossier d’explication, il est très simple d’accéder aux films et documentaires. Alors, après avoir préparer pop-corn et éteins les lumière, je me suis plongée dans ce documentaire féministe de la réalisatrice espagnole Chus Gutiérrez : Rol &Rol.

Parmi tous les films en compétition, j’ai regardé ce documentaire car j’avais apprécié le film Retorno a Hansala de la même réalisatrice. Ce film avait d’ailleurs remporté le prix du Jury Jeune au Festival du Cinéma Espagnol de Nantes en 2009. De plus, le sujet m’intéresse tout particulièrement car je me sens concernée par l’égalité homme-femme.

Chus Gutiérrez a décidé de réaliser un documentaire sur la représentation des femmes dans les médias comme la télévision, le cinéma, la presse et la publicité mais aussi dans la politique ou dans les domaines scientifiques. Le documentaire interroge aussi comment les femmes et les hommes perçoivent cette représentation. De mon salon, je me suis sentie alors immergée dans l’histoire du féminisme rythmée par des témoignages de femmes, de micros-trottoirs, de statistiques et de référence à l’actualité.

Les nombreux témoignages de femmes m’ont donné envie de me battre pour mes droits et pour rendre notre travail plus visible. J’ai aussi beaucoup aimé la partie où elles expliquent que les hommes ont plus de facilité à mettre en scène des personnages masculins et les femmes l’inverse. Je ne m’étais jamais fait la réflexion qu’en effet, il est plus simple pour une femme de créer un personnage féminin en se fondant sur ses expériences ou celles des femmes de son entourage. Cela montre vraiment l’importance de valoriser, distribuer et financer les films de réalisatrices pour que les jeunes filles, les adolescentes et les femmes puissent avoir de nouveaux modèles féminins qui brisent les stéréotypes.

Je vous encourage à voir ce documentaire car il permet de soulever beaucoup de problématiques sur l’égalité des genres. Il met en lumière, les processus d’invisibilisation des femmes et les conséquences d’une société patriarcale sur la vision des femmes. Je remercie le Festival de cinéma espagnol de Nantes pour l’avoir programmé.

Si je ne vous ai pas convaincu, voici le lien youtube: Entretien tourné pendant le festival avec Chus Gutiérrez qui parle du documentaire et de ses motivations.

Margot.


2ème critique écrite par Fanny


La toute première séquence donne immédiatement le ton du documentaire. En 2008, la réalisatrice Chus Gutierrez s’est rendue au Maroc pour un tournage où elle a engagé plusieurs femmes marocaines. En y retournant plus tard, elle découvre l’immense bouleversement qu’a connu la communauté après le passage du film. Plusieurs femmes ont décidé de changer de vie, ont entrepris des formations et ont trouvé du travail. Des changements inimaginables jusque là. La raison ? L’équipe de Chus Gutierrez, y compris Chus elle-même bien sûr, comprenait des femmes aux commandes : techniciennes, réalisatrices. Ces femmes ont alors compris qu’elles avaient aussi la possibilité de s’accomplir par elles-mêmes. Cette introduction résume bien la substance de ce documentaire. Elle montre en effet que le manque de représentations des femmes, dans tous les domaines de la vie et en particulier sur des postes à décision, ne permet pas aux autres femmes de penser le champ des possibles. Elle montre de plus, qu’une fois que les femmes comprennent que c’est possible, elles sont capables de tout entreprendre. 

Le documentaire démontre l’importance des représentations, en particulier dans les médias, dans la capacité des femmes à se représenter, à s’inspirer d’autres parcours pour transformer une société, que la réalisatrice qualifie de particulièrement patriarcale en Espagne, et que l’on peut tout à fait transposer à la France (et à beaucoup d’autres pays d’ailleurs). Le constat est frappant : la femme dans les médias est cantonnée aux trois rôles attendus et incontournables (la mère, la vierge et la putain). Pour sortir de ces carcans c’est une épreuve continue, les exemples d’invisibilisation sont nombreux : les femmes politiques ou scientifiques sont absentes des médias et quand elles sont sur le devant de la scène ce n’est pas pour leur travail mais pour leur physique. La réalisatrice revient sur la fameuse formule “une femme” qui remplace beaucoup de noms de femmes dans les titres des journaux, comme si elles n’avaient pas d’existence propre. La machine est bien huilée, les hommes toujours aux commandes qui favorisent leurs pairs, une société de l’information dont la rapidité ne permet pas d’améliorer les codes mais aussi des nouvelles tendances de discrimination positive qui restent superficielles. 

Heureusement, Chus Gutierrez interroge ici des réalisatrices, des femmes artistes, des femmes politiques, pour leur donner de la visibilité mais aussi proposer des solutions pour changer les représentations afin que les femmes puissent s’identifier, se soutenir et créer de nouveaux chemins pour déconstruire le patriarcat. 

Ce documentaire m’a fait énormément de bien, j’aurais aimé que toutes les femmes en particulier, mais les hommes aussi, le regardent et se rendent compte de l’impact de ce que nous voyons au quotidien dans nos représentations mentales. C’est un documentaire féministe et constructif qui donne la voix aux femmes et à des solutions pour faire évoluer nos sociétés, des solutions qui ne reproduiraient pas les erreurs d’une société patriarcale et non-inclusive mais qui proposerait un nouveau modèle. A voir et à revoir. 

Fanny.

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