6 janvier 2022

Miel, un parfum d’enfance…

Driiiiing ! La cloche sonne pour annoncer la rentrée. Nous ne sommes pas au Théâtre des 100 noms, mais dans une salle de classe. D’ailleurs, nous nous installons devant un grand tableau noir, sur lequel est inscrit « Mr Gromelot ». Cela donne des sueurs froides à certains spectateurs qui ont quitté les bancs de l’école et ne souhaitent pas y retourner ! Heureusement, Miel nous réserve non pas un cours monotone, mais une pièce rythmée et amusante.

Tout au long du spectacle, nous suivons deux jeunes antinomiques nés dans les années 90.

Hugues est le cancre turbulent du fond de la classe.
Lionel, surnommé Miel, est l’intello curieux qui vient d’arriver dans l’établissement.
Ils se retrouvent côte à côte pour la première leçon de Monsieur Gromelot, mais aussi pour une corvée de ménage qui va les faire voyager dans le temps.

Du Paléolithique à la seconde guerre mondiale, en passant par la Rome antique ou la Révolution française, les deux garçons deviennent les témoins et acteurs de l’Histoire… tout en tissant les fils de leur propre histoire. Comme le dit Lionel « c’est l’Histoire qui nous donne des leçons ».

Ainsi, à la Préhistoire, la découverte du feu correspond à la découverte de leurs affinités mutuelles. Bien plus tard, le mouvement révolutionnaire de Mai 68 se télescope avec les premières fissures de leur amitié…

Devenus étudiants, Hugues et Lionel se disputent derrière les barricades de mai 68

Les dialogues sont ciselés de telle manière à faire écho tant à la période historique qu’à leur quotidien. Lors de la Grande Guerre, ils évitent des « missives de craie » et parlent des « gueules cassées par l’acné ».

Et régulièrement, Lionel détaille de petites anecdotes, avec légèreté. On découvre notamment la différence entre un pilori et l’échafaud, ou d’où vient l’expression « l’habit ne fait pas le moine ». Miel est aussi là pour rappeler les dates ou les faits quand Hugues s’emmêle les pinceaux, en commençant par la phrase « Petite faute que l’Histoire t’excusera » qui créé un comique de répétition.

Entre les voyages temporels, nous sommes bel et bien dans les années 90 et 2000 ! Gameboy, souris à blanco, sac banane, téléphone 3310… Si vous faites partie de la génération Y (comme les deux comédiens), tout y est pour vous rappeler les bons souvenirs de cette époque. Et même la chanson « Whenever, Whenever » de Shakira ou la signature d’une mail par « big bisou » !

Pour nous transposer dans toutes ces périodes historiques, pas de décor compliqué mais des objets modulables et ingénieux, comme les casiers d’école qui se transforment tour à tour en colonnes antiques, en tranchées et en palissade.
J’ai beaucoup aimé la mise en scène minimaliste qui suggère plus qu’elle ne montre, comme les guidons de vélo pour représenter l’ensemble ou le jeu de lumières pour les éclairs. Enfin, plusieurs effets sonores (voix off du professeur, bruitage de pas…) permettent de rajouter une présence sur scène au-delà de celle des deux protagonistes.

Deux chaises et deux guidons suffisent à suggérer deux adolescents qui rentrent du collège à vélo…

Au final, ce spectacle d’une heure quinze est une belle découverte. Il est instructif, mais aussi et surtout émouvant et nous incite à prendre soin des petites histoires. Comme le disent les deux compères en conclusion : « Il y a l’Histoire et l’histoire. L’une s’apprend par cœur, l’autre avec le cœur ».

Ecrite pendant le confinement par les comédiens Alexandre SIBIRIL & Guillaume ROUSSEL, cette pièce de théâtre fêtait en cette fin 2021 sa 10e représentation. Lancée avec seulement 20 spectateurs dans la salle, nous étions près de 160 le 29 décembre, dont un tiers venant pour la première fois au Théâtre 100 noms. Un succès amplement mérité, tant par le jeu d’acteurs, que par la richesse du texte ou la mise en scène !

Miel, la petite histoire
Ecrit et joué par : Alexandre SIBIRIL & Guillaume ROUSSEL
Mise en scène: Jérémy SANAGHEAL
Un spectacle de la compagnie Supreme Fourbi
Chronique de Maurane VIOLET pour l’Atelier des initiatives

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