Perdre l’équilibre mais pas la notion du temps
J’aime énormément la salle du Lieu Unique pour l’énergie qu’elle dégage. On ne se sent pas dans une position de spectateur absent et effacé, hyper passif. On se sent inclus dans ce qui va arriver.
La scène était occupée par deux énormes masses, comme deux grosses pierres ou deux morceaux de nuages. Et d’une pente. Juste une pente. Une grande pente.
Ça m’a fait penser aux installations de Yoann Bourgeois. Ça m’a fait plaisir.
La constellation de Yoann Bourgeois (artcena.fr)
Quand ça commence on est intrigué, on a envie de savoir où on va. On se rend comte que les deux grandes masses sont instables au possible, remplies d’air.
La chorégraphe Meg Stewart a écrit un beau spectacle avec des choses originales qui transportent le spectateur. L’espace est exploité d’une manière très juste, la scène, les airs, les bordures.
J’ai vu des très belles choses mais j’ai été freiné par la sensation que je n’avais pas le bagage culturel pour apprécier ou saisir complètement ce qu’il se passait. J’ai eu ce sentiment que c’était d’une grande qualité mais que je ne pouvais pas le comprendre, que c’était du « trop grand art » pour moi.
Quand ça commence on se sent un peu perdue, ça paraît décousu. Le moment où la pression monte c’est prenant. On a du rythme, des intentions de groupe, quelque chose se tisse doucement.
Ça a été un plaisir de voir les musiciens présents et inclus, qui prennent du plaisir à être là. J’ai eu envie de voir plus de sourire, de voir que les danseurs appréciaient être là aussi. Leurs yeux paraissaient absents parfois, et pourtant c’était vraiment des moments riches quand deux danseurs se parlaient avec un regard. On sentait que chacun était pris dans son improvisation mais leur partition interne se substituait à leur présence. Je suis clairement passé à côté de « l’hyperprésence » évoquée par Meg Stuart.
Un personnage a vraiment marqué mon attention. Il arrive sur scène avec son casque, on ne le comprend pas complètement mais il ressort parmi les autres danseurs. Je n’ai pas arrêté de regarder Jayson Batut. Il avait une vrai présence de physique et d’esprit. Màrcio Kerber Canabarro et Isabela Fernandes Santana ont aussi eu une grande présence de corps à certains moment du spectacle.
Les 7 danseur.euse.s évoluent la plupart du temps dans leurs coin. Ils se rejoignent parfois sur certaines patterns ou part des jeux d’imitations, c’est dans ses moments que je me suis sentie transporté.e d’avoir des mouvements collectifs. Ça portait vraiment le spectacle. Quoi que je puisse en dire, le spectacle est un vrai tour de force contre la gravité, il déstabilise toute notion d’équilibre.
Par contre j’ai eu le sentiment assez terrible que c’était un peu long. Ça manquait de rythme à certains moment mais en même temps, on se nourrissait d’autant plus quand le rythme était écrasant.